Pour les vacances de Noël 06/07, j’avais préparé des dizaines de vieux films des années 60, 50, 40 et même 30. Pourquoi ? Le but était double : nous offrir une ambiance magique pour 15 jours en abolissant l’ancrage temporel pour nous projeter dans une parenthèse enchantée ; proposer une expérience culturelle en tentant de sentir l’évolution de la narration, du jeu, l’irruption du talent, du génie.
De fait, les Grands étaient au rendez-vous. Fritz Lang avec Le Testament du Docteur Mabuse ou Le secret derrière la porte, Orson Welles avec La puissance du Mal, les premiers Chabrol avec Le boucher ou Les biches, Jacques Tourneur avec L’homme-léopard, Hitchcock surtout avec le coffret de sa fantastique série Hitchcock presents (55 à 62) mais aussi Sabotage ou Agent secret, Lifeboat, Correspondant 17, La corde… D’autres encore, dont un vieux film britannique, Noblesse oblige (1949).
Ce dernier film, remarquable, doit une partie de sa légende aux mille et un rôles endossés par le grand Alec Guiness. Et c’est… injuste ! Non que sir Alec ne soit pas à… sa propre hauteur mais… le véritable prodige du film est ailleurs, un extraordinaire Dennis Price, que je ne connaissais nullement.
Comme je le fais désormais régulièrement, j’ai donc approfondi la vision du film par quelques recherches sur Internet. Car je ne comprenais pas. Ce type m’avait semblé tout simplement prodigieux, nimbé de ce halo magique qui entoure George Sanders ou le Cary Grant de la maturité, Ingrid Bergman ou Monica Vitti.
Dennis Price. Un inconnu. Interrogez 1 000 personnes. Aucune ne connaît. Sur 100 000, peut-être. 1 000 000, même pas sûr.
Pourtant. Je lis. Et… Je ne me suis pas trompé ! Oui, de son temps, il a été reconnu, célèbre, pressenti pour devenir… LA PLUS GRANDE STAR BRITANNIQUE de tous les temps. Et puis la vie… On prend un mauvais chemin, on fait de mauvais choix et…
La vie est cruelle. Tout le monde connaît Tom Cruise ou Harrison Ford, ils ont une présence, bien sûr, et ne sont pas là par hasard, mais… Au départ, ils n’ont même pas un centième du talent d’un Dennis Price. Ou d’un George Sanders, d’un Anthony Quayle (qui, eux, heureusement, comptent pour le cinéphile !). Objectivement.
Et il y en a tant, des talents, petits ou grands, immenses parfois, qui passent à côté d’eux-mêmes, de nous…
Un petit coup de cafard !
Et si on faisait tous un effort pour ouvrir les yeux et jouer les orpailleurs, découvrir ce qui est Beau, Bon et Bien… et le faire connaître !
Donc, je vous dis : courez visionner Noblesse oblige ! et savourez Dennis Price. Et, dans la foulée, redécouvrez le merveilleux Heaven can wait de Lubitsch. Qui, dans le registre de la comédie animée (de anima, l’âme !) a fait mieux ?
(mai 2007)